Quand on voyage pendant un certain temps, on peut vivre des moments où on a envie de se sentir à la maison, de retrouver une partie de son quotidien, tel qu'on le vit là où on habite. Parfois ce désir ne dure qu'un instant, parfois il s'étire sur une plus longue période. Pourquoi en vient-on à éprouver une telle nostalgie en voyage? Je veux dire, on a rêvé de ce périple, on réalise ce rêve, on découvre sans cesse de nouveaux trucs sur le pays visité, sur nous-même. On devrait donc baigner dans une constante euphorie. C'est peut-être bien là, le problème: on finit par se lasser de tout, même de l'euphorie. Car elle devient alors une routine.
Je ne crois pas que vivre des aventures extrêmes soit la meilleure façon de se « guérir » cet état d'esprit. Au contraire. À mon sens, se réfugier dans des expériences très intenses ne peut qu'exacerber ce sentiment de disparité entre la situation dans laquelle on patauge et les émotions qui mijotent en nous. Je pense qu'il est bon, dans de tels cas, de prendre un peu de recul, de pleinement ressentir les émotions qui nous traversent, de les accepter telles qu'elles sont et de chercher du réconfort dans ce qui évoque notre quotidien.
Différentes solutions s'offrent alors à nous pour soulager cette mélancolie: écouter notre musique préférée, lire un livre important pour nous ou une lettre (ou courriel) écrite par un proche, cuisiner un plat familier, regarder des photos d'êtres chers, etc. C'est dans les petites choses que l'on trouve le plus grand réconfort. Ainsi, j'avais tenté de me faire une poutine à Sanare, dans les Andes vénézueliennes (voir mon texte du mardi 30 octobre 2007). Comme je n'avais pas accès au fromage qui « scouiquent-scouiquent » sous la dent, j'en suis arrivé à un résultat pour le moins désastreux, et ce, même si j'avais eu la présence d'esprit d'emmener avec moi de l'authentique sauce à poutine en poudre. Malgré tout, ce fiasco culinaire m'avait remonté le moral. C'est que le quotidien, celui de notre lieu de résidence, constitue le meilleur antidote dans pareilles circonstances, car il se situe à l'opposé de l'euphorie dont on est blasé. Et par le fait même, il redevient nouveau, il prend un éclat neuf, le temps d'un instant, le temps de nous ragaillardir.